Par Kim Déry
On se souvient presque toujours du premier jour. Le stress, le sourire un peu maladroit, la main tendue, le poste à apprivoiser, les collègues à découvrir. Mais on parle beaucoup moins du dernier. Et pourtant, c’est souvent celui qui laisse l’empreinte la plus durable.
Dans une organisation, les arrivées sont célébrées. Elles sont pleines de promesses, d’élan, de projets. Les départs, eux, sont parfois vécus dans le silence, la gêne ou la précipitation. Comme s’il fallait passer vite à autre chose. Pourtant, le départ est un moment aussi important que l’arrivée. Il vient clore un chapitre. La manière dont ce chapitre se referme influence profondément le souvenir que l’on garde… et celui que l’on laisse.
En RH, on observe tous les types de départs : ceux chargés d’émotion, ceux remplis de soulagement, ceux empreints de fierté, ceux teintés de déception. Mais une chose demeure constante, on ne quitte jamais complètement une équipe. On laisse toujours quelque chose derrière soi : un geste, une trace, une influence, parfois même un changement invisible mais bien réel dans la culture.
Partir par la bonne porte, ce n’est pas qu’une question de procédures ou de cases à cocher. C’est d’abord une question de respect. Respect du travail accompli. Respect des liens humains tissés au fil du temps. Respect de ce qui a été construit, souvent dans l’effort, parfois dans l’adversité, mais toujours avec engagement.
Un départ bien accompagné est un puissant geste de reconnaissance. Il permet de nommer ce qui a été, de remercier ce qui a été offert, de fermer la boucle avec intégrité. Il offre à la personne qui quitte la possibilité de partir avec le sentiment d’avoir compté. Il envoie aux personnes qui restent un message clair : l’humain est important, du premier au dernier jour.
Un départ bien vécu ne se limite jamais à la personne qui quitte. Il a un impact direct sur le climat, la confiance, l’image de l’employeur et la solidité de la culture organisationnelle. Il renforce la crédibilité des gestionnaires. Il nourrit le sentiment d’appartenance de ceux qui poursuivent la route. Il rappelle que la dignité ne se mesure pas seulement dans les débuts, mais aussi dans les fins.
Et puis, il y a cette vérité que l’on sous-estime souvent, dans un monde professionnel aussi petit que le nôtre, on ne quitte jamais vraiment. Les chemins se croisent à nouveau. Les rôles changent. Les relations évoluent. Les anciens collègues deviennent parfois des partenaires, des clients, des alliés, des références. Quitter sans brûler les ponts, c’est préserver l’avenir. C’est faire le choix de la maturité, de l’élégance et de la vision à long terme.
Il faut une grande lucidité pour comprendre qu’un départ n’est pas un échec. C’est une transition, une étape, une évolution. Et il faut beaucoup d’humanité pour accompagner cette transition avec ouverture, reconnaissance et authenticité.
Alors, à l’aube d’une nouvelle année, alors que 2026 se dessine déjà avec son lot de défis, de projets et de mouvements, prenons un moment pour réfléchir à la place que nous accordons aux départs dans nos organisations. Donnons-leur l’importance qu’ils méritent. Faisons-en des moments de gratitude, de respect et de continuité plutôt que de simples formalités à expédier.
Car pour finir, on ne se souvient pas seulement de ce que l’on a fait dans une organisation. On se souvient surtout de comment on y a été traité… jusqu’au dernier jour.
